Petits
arrangements avec le développement durable
Entre
production scientifique et instrumentalisation médiatique
Véronique André-Lamat,
Laurent Couderchet, André-Frédéric Hoyaux
UMR 5185 ADES,
Université de Bordeaux
paru dans Education Relative à l'Environnement, Vol. 8, pp.163-183
Mots clés
Publicité écologique, slogans, images, représentations
sociales, représentations scientifiques, éthique
Résumé
Dans l’univers de la communication, l’enjeu
environnemental est aujourd’hui recyclé en “argument commercial” par les
stratégies de positionnement des organisations qui sont le plus souvent pointées
du doigt par les écologistes. Cette tendance traduit la capacité du système à
se dépasser par ses propres limites et à se protéger de ses contradictions
successives en les intégrant à son discours.
Ce projet est l’occasion d’étendre la question du
marketing écologique aux slogans et à la mobilisation iconographique. Ce point
de départ amène à confronter éthique de
l’environnement, éthique de la communication et in fine éthique de
l’éducation. Ainsi, comment déplorer le marketing écologique de tel groupe
multinational lorsque les organisations territoriales et politiques utilisent
les mêmes ressorts pour gagner l’adhésion des citoyens ? De même, comment
critiquer les simplifications des discours publicitaires vantant les mérites de
la durabilité d’un produit ou sa qualité environnementale quand les
associations écologistes et parfois d’éducation à l’environnement brandissent elles
aussi des slogans qui réduisent singulièrement la complexité des systèmes
socio-environnementaux ?
Ce texte tente de mettre en regard les discours
argumentés qui ont pour vocation de faire autorité et les discours symboliques,
via l’univers de la publicité, qui jouent tout à la fois de la rhétorique
visuelle et textuelle pour construire les catégories et les références qui
leurs sont associées sur la problématique du développement durable.
Key
word:
Ecological
publicity, slogans, images, social representations, scientific representations,
ethic
Summary:Nowadays,
environmental problems are increasing in the opinion. Therefore, ecological
arguments are getting more and more important in marketing programs. This way,
big companies can catch ordinary people’s attention and anticipate green
reactions about their own environmental impacts.Studying
a corpus of advertising, we show how ecological marketing spreads through the
all society. The phenomenon is of course effective in commercial advertising
but also in non governmental organisations and local authorities.It allows us to confront ethics
of the environment, ethics of communication and in fine ethics of education.
Biographies
Véronique André-Lamat, agrégée de
Géographie est enseignant chercheur à l’UMR ADES CNRS / Université de Bordeaux.
Ses travaux de recherches portent sur la construction des représentations de la
nature et l’analyse de modes de gestion de l’environnement, et notamment sur
les modalités d’élaboration de l’action publique environnementale.
Laurent Couderchet est enseignant
chercheur en géographie à l’université de Bordeaux et à l’UMR 5185 ADES, CNRS.
Ses travaux portent sur les paysages et la reconnaissance géomatique des états
de la nature : diagnostics experts, diagnostics profanes partagés.
Discours et politiques publiques de préservation de la biodiversité participent
de ses centres d’intérêt.
André-Frédéric Hoyaux est
enseignant-chercheur à l’UMR ADES CNRS / Université de Bordeaux. Il travaille
avec des méthodologies qualitatives d’entretiens multiples soit de réactivation
soit d’explicitation sur support discursif ou iconique auprès de divers types
d’acteurs. Ces méthodes permettent de mettre en lumière la capacité
justificatrice des actions humaines dans l’espace et des conceptions
idéologiques de l’espace.
Introduction
Dans
l’univers de la communication, l’enjeu environnemental, qui s’opposait jadis au
productivisme économique, structure désormais l'ensemble des discours et des
stratégies. Les industriels, pointés du doigt par les écologistes, transforment
les contraintes environnementales en potentiels commerciaux ou les intègrent dans
leurs systèmes de décisions opérationnels : en amont, à travers les
comités d'éthique ou les “clubs de développement durable”, voire les fondations
d’entreprises ; en aval, à travers la mise en place de normes maquillées
en externalités positives pour l’humanité. La question environnementale,
devenue populaire et incontournable tandis que s'affirmait l'idée d'un
développement durable, est ainsi devenue un produit d'appel, une ressource en
elle-même. Les collectivités territoriales et les associations participent
également de cette mobilisation, de cette convocation à l'environnement, qui s'organise
suivant différentes modalités et différentes approches.
A
l’occasion des travaux français du Grenelle de l’environnement décentralisé à
Périgueux, la question de l’éthique en éducation à l’environnement a notamment
porté sur le “marketing écologique”, seul sujet sur lequel les participants de
l’atelier consacré à la “démocratie écologique” ont envisagé de proposer un
recours à la réglementation. Les partenaires réunis à cette occasion ont
beaucoup insisté sur la nécessité d’un renforcement de l’éducation à
l’environnement ou au développement durable, destiné à améliorer les capacités
d’appréhension de problématiques complexes et incertaines pour une implication citoyenne
éclairée dans le débat territorial participatif. L’article 8 de la Charte de l'environnement récemment
intégré en préambule de la constitution française au même niveau que la
déclaration des droits de l'homme de 89 ne précise-t-il pas que « L’éducation
et la formation à l’environnement doivent contribuer à l’exercice des droits et
devoirs définis par la présente Charte » ?
Dans
cet article, nous proposons d’interroger et d'analyser la question du marketing
écologique, en nous appuyant sur un corpus documentaire composé de slogans,
d'iconographies, mais aussi d'extraits de sites Web ou de discours[1]. Ce
point de départ amène ainsi à confronter éthique de l’environnement, éthique de
la communication et in fine éthique de l’éducation.
L’Ethique vise à examiner des
questions et essayer de comprendre leurs implications, plus qu’à donner des
solutions (Dolan, 1999). Ainsi, selon la circulaire n°2004-110 du 8 juin 2004
de l’Education nationale relative à la « généralisation d’une éducation à
l’environnement pour un développement durable », l'éducation à l'environnement
et au développement durable renvoie à
cette dimension éthique. Il s'agit tout d'abord de mobiliser l'approche
systémique pour appréhender et faire comprendre la complexité des phénomènes et
des réponses à apporter aux problèmes environnementaux. Il s'agit également de
développer une approche critique, de mettre « en valeur
l’importance des choix et la responsabilité
de chacun dans ses choix »,
d'intégrer « les valeurs associées à un développement solidaire ».
En cela, l’éthique participerait d’un
tournant herméneutique au sens où il n’y aurait plus d’interprétation “scientifique”
univoque (une objectivité) réalisée par un interprétant unique (le scientifique
qui objective) mais un ensemble de rapports entre constructions multiples du
sens sur un même objet (interobjectivité) et une multitude d’interprétants plus
ou moins constitués en collectifs sociaux (associations) ou professionnels
(scientifiques).
Si
l'on part du postulat qu'éduquer, c’est (en partie) apprendre à comprendre des
modèles et tout autant apprendre à les construire, alors une éducation efficace
suppose certes une transmission de connaissances mais aussi de valeurs qui s’établissent
en référence aux modèles. Or l'éducation doit construire la capacité à
critiquer : « Si jamais vous substituez
dans son esprit l’autorité à la raison, il ne raisonnera plus ; il ne sera plus
que le jouet de l’opinion des autres »
(Émile
ou De l’Éducation –
Rousseau, repris par Philippe Meirieu dans un cours intitulé : Qu’est-ce-que la pédagogie ? 2008).
En ce sens, un des défis de l'éducation est bien d'apprendre à
déconstruire des modèles, à décoder les discours qui les sous-tendent, à gérer
l’incertitude et acquérir la capacité de construire individuellement une
responsabilité, un engagement envers un projet collectif pour un bien commun.
Alors, « éduquer à l’environnement » puis « éduquer au
développement durable »[2], renvoie
en partie à l'éthique de l'environnement[3], qui
préconise de la retenue dans l’exploitation
de l’écosphère. De la même manière, dans le discours construit sur
l’environnement, la démarche éthique relève certainement d’une retenue, tant
les problématiques en cause ont parfois des fondements incertains. Dans sa
démonstration d'un glissement vers la pensée unique, Georges Rossi (2000)
fustige une pensée écologique qui « sous couvert de justifications
morales et scientifiques, transforme l’hypothèse en vérité, la probabilité en
certitude et en idée reçue ».
Au-delà
de l'objectif de construire un modèle (éthique ?) de compréhension de
l’environnement, voire d’approches et d’usages éthiques de l’environnement, l’éducation au développement durable a une
double vocation.
Elle vise tout d'abord à améliorer les
capacités d’appréhension de problématiques complexes et incertaines. Le passage
de l’environnement au développement durable a rétabli institutionnellement les
interactions entre le système écologique et son environnement (au sens
systémique) et il a réintégré les acteurs économiques dans les problématiques
environnementales. Le degré de complexité à appréhender a été fortement accru
par la notion de développement durable, notamment parce qu’elle impose de
prendre en compte plusieurs interprétants de cette complexité.
Elle
introduit ensuite explicitement un
précepte nouveau, celui de l’implication citoyenne dans les projets, et fait
émerger un besoin indispensable d'éducation. Cette éducation se déroule en formation continue. Aux plus jeunes,
elle est dispensée en principe par l’éducation nationale qui propose des
programmes et des instructions de plus en plus précis pour réduire la part d’interprétation
qui pourrait naître de la diversité des intervenants. Aux plus grands, la
formation passe par la compilation d’un ensemble d’informations produites par
une palette médiatique de plus en plus conséquente. Pour autant, la chaîne
d’information est très souvent circulaire et propose des liens qui se renvoient
les uns aux autres : entre les types de média (Internet reprenant des
informations des journaux télévisés reprenant des informations de quotidiens,
etc.) et à l’intérieur même d’un type de média (des sites Internet reprenant des
informations d’autres sites Internet). Ces renvois mutuels créent une sorte de
convergence sémantique qui freine la construction d’un esprit critique.
Or,
une vraie participation nécessite un minimum de connaissances (ou d’expériences).
En ce sens, l'éducation au développement durable devrait aussi s'appliquer à forger
une implication citoyenne “éclairée” dans le débat territorial participatif, ce
qui interroge : la participation doit-elle seulement intervenir a
posteriori, dans l’action territoriale ? Ou doit-elle s’envisager dans
le cadre même du projet d’éducation ?
L’éducation
à l’environnement et/ou au développement durable ne concerne donc pas seulement
les enfants, collégiens ou lycéens ; elle s’adresse aussi aux adultes citoyens
et renvoie à une certaine conception du civisme. Une des questions clés est
alors : qui participe à construire cette éducation et les modèles qui y
sont associés ? Est-ce l'école ou l'université ? Est-ce les associations
de défense ou d'éducation à l'environnement ? Ou est-ce la télévision et
la publicité qui propose des modèles dont la légende implicite ou explicité
génère dans un même package, discours et interprétation du discours ?
Au
regard de l’idée que le spectaculaire (Debord, [1967] 1996) est l'instrument de
médiatisation des enjeux environnementaux et que de nombreux agents et modes de
communication s'en sont emparés, la question de l’éthique en éducation à
l’environnement porte en particulier sur le “marketing écologique”. Lorsque le marketing écologique devient
vecteur d’éducation (ou de pédagogie ?), que s'instaure via ce marketing
une relation dominant/dominé (producteur du message/récepteur du message), que
des enjeux économiques ou idéologiques se manifestent, alors le message se
brouille au gré des intérêts des producteurs du message.
Notre
analyse sémiotique de l’image des publicités et des discours (Gervereau, [1996]
2004 ; Joly, [1993] 2004 ; Sauvageot, 1987) fait le constat d’une
production scientifique happée par des outils de communication qui conforment
les regards sur le développement durable.
Deux
catégories de slogans (d'approches ?) sont retenues ici : celles qui annoncent
la victoire de l’inventivité de l’industrie sur la crise écologique, celles qui
recyclent et réorientent les analyses et les points de vue sur les grandes
questions scientifiques pour minorer, simplifier ou détourner la réalité.
1 - Justifier
le modèle social et économique, un certain regard sur le développement durable
La définition du développement durable proposée
en 1987 par le rapport Brundtland est consensuelle, l'ensemble des catégories
d'acteurs (politiques, économiques, associatifs, etc.) s’en est emparé. Ce
consensus "mou" s'explique par les multiples interprétations qu'elle autorise.
En simplifiant et sans rentrer dans les nombreux débats sur le sujet, des approches
plus “économicistes” (durabilité faible) et des approches plus “écologiques” et
normatives (durabilité forte) se distinguent[4].
L'engouement pour l'environnement des grandes
entreprises surfant sur la vague du développement durable se traduit dans les
stratégies de communication. Le vocabulaire et l’iconographie renvoient
à une nouvelle rhétorique, mobilisent de manière constante les mots « nature »,
« environnement », « équité »,
« responsabilité », « éthique ». Leur récurrence dans les
discours a pris une telle ampleur que
dès 1998 le Bureau de Vérification de la Publicité (BVP de l'Association des
professionnels pour une publicité responsable) puis le Conseil d'Ethique
Publicitaire se penchent sur la question. Le BVP édite des recommandations sur
l'argumentaire écologique, puis en 2007 sur l'argumentaire développement
durable. En partenariat avec l'ADEME, un observatoire est monté et un rapport
publié : « La publicité est-elle respectueuse du développement
durable ? » (juin
2007).
La teneur du message véhiculé par le biais
des slogans, des mises en scènes et de l'iconographie est bien aujourd'hui le
cœur d'une réflexion qui touche à la capacité de recevoir, décoder, interpréter
un message publicitaire. Ce message est par nature simplificateur, mais dans
quelle mesure peut-il s'avérer manipulateur, peut-il être instrumentalisé, peut-il
générer voire justifier des comportements “non éthiques”, dès lors qu'il
participe (consciemment ou non) à
construire une certaine vision des problèmes environnementaux et du « comment
faire du développement durable » ?
Sur un marché devenu très concurrentiel, les
entreprises considèrent manifestement que les thématiques de l'environnement et
du développement durable constituent non seulement une opportunité commerciale
mais aussi un facteur positif de leur image. Deux exemples sont ici analysés
concernant les multinationales VEOLIA et TOTAL, plutôt considérées comme de
bons élèves par le BVP.
“L’environnement est un défi industriel”
VEOLIA
nous embarque dans le champ de l'environnement par la mobilisation d'une figure
emblématique des problèmes environnementaux qui a fait ses preuves :
l'arbre. L’arbre renvoie aux discours médiatisés sur la déforestation,
l'Amazonie, le “poumon vert” de la planète. C’est un symbole immédiatement
identifiable pour caractériser les enjeux environnementaux. Considérant qu'elle
correspond à « la prise en compte des multiples liens sensibles à
l’environnement » (Blanc, 2008), l'esthétique de l'image est
irréprochable. Son organisation et la dominante de vert participent à produire
une composition imaginaire d'un lieu qui a un sens écologique pour qui le
contemple.
La
figure de l'arbre est parfaite avec des axes de communication routiers
constituant le réseau de branches, de nervures qui l’irrigue et le nourrit :
message dont la clarté environnementale peut paraître paradoxale. Mais l’analogie
est cohérente au regard du petit paragraphe explicatif. En effet, aucune remise
en cause de l'augmentation de la consommation d'eau et d'énergie, de
l'augmentation de la production de déchets etc., n'est envisagée. Pourquoi le
seraient-elles puisque ces fameuses nervures ne sont que les représentations
des “flux” nécessaires qui irriguent les villes (comme la sève pour l’arbre) et
qui sont gérés avec tant de “naturel” par Véolia ! Un simple constat donc
de “l’indispensable” nécessité de ces déplacements d'énergie, auquel il faut “simplement”
trouver une solution grâce à une gestion efficace.
“L’environnement est un défi industriel”
Le slogan de VEOLIA réduit ainsi l’environnement à des solutions dont dispose
l'entreprise grâce à des techniques et des métiers, et donne peut-être raison à
ceux qui militent pour le maintien de l’expression “Education à
l’environnement” (Sauvé, 2002). Au-delà, il y a implicitement un positionnement
singularisant, Veolia est l’arbre qui cache la forêt (les autres entreprises ?).
L'environnement un bien économique à
cultiver
Comme
celui de Véolia, le message de Total vise à rassurer, et même à démobiliser le
citoyen consommateur : ne changez pas de mode de consommation, TOTAL
assure et assurera l’approvisionnement. “Pour vous, notre énergie est
inépuisable”.
Le
parallèle entre la débauche d’électricité et le jaune infini d’un pseudo champ
de colza est à ce titre édifiant. Les
images se répondent, s'appuient sur la couleur chaude et réconfortante et
participent par l'esthétique à construire finalement « une
représentation de l’espace sensible dans lequel nous vivons et auquel nous
aspirons » (Blanc, 2008). La stratégie n’est pas de nier
mais de contourner le problème de l'énergie, de l'inscrire dans un paradigme
qui ne remette pas en cause le modèle de développement économique. L'enjeu pour
TOTAL est clairement économique : il s'agit de “répondre à la demande”. La référence aux carburants du futur
renvoie à une utilisation de la nature qui peut paraître antinomique avec des
objectifs de préservation de l'environnement, de limitation d'exploitation des
ressources. Total entretient une vision du développement durable qui réconcilie
la consommation et la nature, en proposant de remplacer des biens et services
non renouvelables par des formes renouvelables (biocarburants et agrocarburants
sans distinguo) : “pour mettre au point les carburants, nous faisons
appel à la nature”. L’insecte butineur présent sur une fleur au premier
plan est destiné à rassurer sur le caractère environnemental de l’agriculture
fournisseur des carburants du futur. Total ne promeut-il pas la biodiversité à
travers sa fondation ? Ici le positionnement est double, il s’agit de
montrer : premièrement, à travers l’image de l’abeille, le changement des
manières de faire, la substitution progressive d’une externalité négative
(symbolisée par l’image du haut, une usine qui dans l’imaginaire pollue, fait
du bruit, etc.) par une externalité positive (symbolisée par l’image du bas,
cette abeille qui butine et dont la portée symbolique relève de la nature
auto-productive, donc paradisiaque puisque l’homme n’y a pas à faire d’efforts) ;
deuxièmement, au-delà de cette substitution somme toute utopique, la nécessité
de mettre en place quelque part des technologies pour transformer et amener cette
énergie auprès des hommes.
Enfin
la publicité montre aussi la capacité des hommes à faire du beau à travers ce
déferlement technologique. Reprenant le titre du livre de Richard Bohringer et
le modifiant quelque peu, comment ne pas se dire en voyant l’image que
« c’est beau une usine la nuit » !
Comme
dans les spots radio et télévision de tous les fournisseurs d’énergie, le
message est assorti de la formule pudique réglementaire : “l’énergie
est notre avenir, économisons la”. A l’instar des formules “fumer tue”
et “mangez au moins cinq fruits et légumes par jour” imposées aux
marques de tabac et à l’alimentation, la puissance publique impose une formule
dérisoire censée contribuer à la conscientisation des masses[5]. Sur
l’affiche, la mention obligatoire écrite en caractères ridiculement petits est
accolée à un slogan ambigu et contradictoire du message officiel, beaucoup plus
visible celui-là : “notre énergie est inépuisable”. La
multinationale qui se pose en organisation responsable (“carburants et produits respectueux de l'environnement”), pense le
futur pour nous. Elle adopte une double stratégie : de culpabilisation et
de sécurisation (inquiéter pour mieux sécuriser), l’objectif n’est pas de
négation mais de contournement.
Plus
globalement, Total a pris conscience de la nécessité de ne pas faire peur aux
consommateurs sur l’éventualité qu’ils n’aient plus accès “facilement”,
c’est-à-dire en tout lieu et à tout moment, aux services énergétiques. Pour ce
faire, l’idée est de forcer le trait et de se positionner sur une symbolique
ubiquiste (être partout en même temps) et uchroniciste (être en tout lieu sans
qu’il n’y ait besoin de faire des efforts par rapport à une chronologie
particulière : exploiter un gisement, transporter la matière première,
travailler cette matière première jusqu’aux consommateurs). Ces spécificités
qui hier encore étaient l’apanage de Dieu semblent donc maintenant partagées.
Comme
la publicité Véolia, la publicité Total envoie, toujours dans un esprit de sécurisation,
un message subliminal au consommateur. Sur la première image, un bosquet
dessine la silhouette d’une girafe, sur la seconde, les fleurs sont butinées
par une abeille sur-dimensionnée, ce qui doit nous rassurer sur les pratiques
culturales à l’origine de la matière première. L'analyse de ces deux exemples
nous amène à constater la production d'un discours aussi flottant que la notion
même de développement durable, qui s’appuie finalement sur la nature productive
(TOTAL), l’environnement submergé mais reconstruit par les productions humaines
(VEOLIA). Il n'est cependant aucunement question de réviser un mode de
consommation, un mode de développement mais plutôt de le conforter. On aurait
d'ailleurs pu mobiliser de la même manière, pour étayer notre propos, une série
de publicités sur les véhicules hybrides, produisant moins de CO2, Toyota
ou Renault par exemple. Il s'agit clairement de préserver la capacité des
sociétés à produire et non pas à conserver telle ou telle ressource. L'objectif
est de remplacer des biens et services non renouvelables par des formes
renouvelables, ce qui implique une confiance totale dans le progrès technique.
La foi en la science et la technologie est ici structurante et conduit
l’individu loin de toute évocation d'une crise quelconque de la modernité. La
conception et la configuration des techniques organisent la société en la
subordonnant à un certain ordre (Feenberg, 2004). On peut enfin se demander
s’il n’y a une certaine forme d’ironie machiavélique dans ces publicités à
l’adresse de la société : dites-nous vos représentations et vos lubies,
nous arriverons toujours à les intégrer dans nos nouvelles technologies !
2- Interobjectivité et intersubjectivité en
question
Le
développement durable, comme l’environnement, a une dimension systémique, c’est
un des fondements du rapport Brundtland. Parmi les grands préceptes de la
systémique définis par Von Berthalanffi ([1968] 2002), la complexité est
associée à l’incertitude. La méthode systémique justifie la simplification dans
un but de compréhension des structures et dynamiques des systèmes, cette
simplification produisant l’incertitude (Le Moigne, [1977] 2004). Lorsque
“l’animation environnementale” devient communication, ce principe
simplificateur devient slogan et l’hypothèse se fait conclusion.
En
choisissant de communiquer sur l'environnement, l'univers de la publicité
mobilise les grandes problématiques qui intéressent le monde scientifique. Il
opère ensuite des simplifications qui génèrent des affirmations. Celles-ci
s'appuient sur différentes formes de vulgarisation scientifique qui ont percolé
une grande part de la société aujourd'hui, par le biais de personnages
emblématiques (non scientifiques) tels que Nicolas Hulot ou Yann Artus
Bertrand, nouveaux héros de l’écologie citoyenne, et d'émissions télévisées
dites “grand public”. Sans faire une défense de castes, ces personnages sont
souvent hors champ des disciplines dont ils prétendent savoir quelque chose. De
ce fait, il y a une sorte de connivence avec le public qui arrive alors à
travers eux à se projeter lui aussi comme possible commentateur de l’actualité
de la crise environnementale. Ces personnages présentent les mêmes symptômes
que les nouveaux philosophes sur lesquels Pierre Bourdieu avait travaillé quand
ces derniers avaient les faveurs des médias. Aujourd’hui, ces faveurs se
tournent vers quelques “scientifiques” semblant avoir du “crédit” mais qui
surtout apportent avec eux l’audimat, ce champ économique « très
hétéronome » et donc « très fortement soumis aux contraintes
commerciales » (Bourdieu, 1996, p. 62). Cette hétéronomie était traduite
par Bourdieu comme la possibilité donnée à quelqu’un qui n’est pas spécialiste
dans un champ de recherche de faire des commentaires en tant que spécialiste
dans ce champ ou de pouvoir juger un spécialiste de ce champ comme s’il l’était
lui-même.
Un
jeu d’autorité se construit donc entre journaliste, spécialiste supposé et
spécialiste tout court. Et la partie pédagogique n’est évidemment pas gagnée
quand celle-ci s’inscrit dans le jeu du classement qui relève plus de
l’affectif que de l’effectif ! Hier, Bourdieu relevait que « les
hebdomadaires adorent ça : faire le bilan de la décennie, désigner les dix
grands “intellectuels” de la décennie » (Bourdieu, 1996, pp.66-67).
Aujourd’hui, l’Express dans un numéro spécial « Agissons maintenant.
Urgence écologique » nous propose d’élire nos « héros
écolos » : « Connus - ou non - du grand public, ces
hommes et ces femmes se battent pour sauver la planète, chacun à sa manière.
Que pensez-vous de leur action ? » Et de nous permettre ainsi au-delà
des six stars en photos (Al Gore, Hulot, Bertrand, Vanier, Etienne et Di
Caprio) de voter pour notre héros : « Vous voulez vous aussi proposer un nom ?
Envoyez nous votre proposition par e-mail en cliquant ici »
(http://blogs.lexpress.fr/ecologie/ces_heros_ecolos.html). Derrière ces images
de héros écolos se glisse la personnalisation des héros légendaires qui
rappelle les grands sauveurs de l’humanité et les histoires plus ou moins
vraies, plus ou moins imaginées que nous racontaient au coin du feu nos grands-mères
dans leur bonne sagesse… Histoires qui avaient toutes une morale, structurante
et structurée depuis des siècles, évoquant en cela la durabilité du bon sens.
Pour autant, nous verrons qu'il ne s'agit pas d'opérer une simplification
visant à mieux faire comprendre la complexité, mais plutôt d'alimenter la
construction de récits, susceptibles de nourrir l'imaginaire et les
référentiels collectifs, de fonder de nouveaux mythes. Pour cela, et suivant les
conceptions de l'environnement et de l'écologie parfois assez radicale de la “Deep
Ecology”, la planète sera assimilée à un “être vivant”. Cette fois, c’est la Terre qui se trouve
personnalisée pour nous la rendre plus chaleureuse, plus proche, comme c’est le
cas pour le Gaïa de James Lovelock,
ou pour la lecture qu’en fait Jonas dans sa conception ontologique. Autant de
systèmes de valeurs qui nourrissent de nouvelles orientations idéologiques et
mentales pour les sociétés sur lesquels se positionnent les industriels.
Eviter
la reproduction de “l'écocide” de l'île de Pâques
Dans
cette publicité, EDF nous raconte une histoire tragique et qui serait "vraie"
: celle de la disparition d'un Eden, liée à la surexploitation des ressources
par trop d'hommes sur un petit espace clos. “Il
y a bien longtemps, l'île de Pâques était un paradis. Ses habitants
construisaient de grandes statues pour honorer leurs ancêtres. Ils les
sculptaient dans la pierre et les transportaient sur des rondins de bois. On
raconte qu'ils coupèrent tant d'arbres que leur petite île devint un désert.
Notre planète est comme l'île de Pâques au milieu de l'océan : on peut la
détruire ou la préserver, mais on ne peut pas la quitter (…)”.
Dans
un premier temps d’analyse, le “on raconte” évoque la légende, l’historicité
des choses, la morale, la pensée partagée, il permet aussi la
déresponsabilisation derrière la masse et l’histoire. Le “il y a longtemps”
sous-entend une histoire ancienne, qu’EDF assure comme un passé révolu. Mais
dans un second temps d’analyse, le “on
raconte” fait référence
également à l'ouvrage « Effondrement.
Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie »,
de Jared Diamond (2005, traduit en 2006). Biogéographe renommé de l'université
de Californie, l’auteur est membre de la direction du WWF (World Wild Fund).
EDF s'appuie sur cette idée essentielle de la responsabilité des hommes, au
travers de leurs actes et de leur choix, et montre une volonté d'engagement, un
comportement responsable envers ceux qui n'existent pas encore “(…) pour les générations futures, EDF
consacre 1 million d'euros par jour à la recherche” : deux idées que l'on retrouve chez Jonas. Pourtant l'ouvrage
de Jared Diamond a été contesté et ses théories remises en causes dès 2006 par
Jean-François Dortier (puis Duvoux en 2007). Plus globalement, les relations
causales et linéaires entre population et environnement sont depuis longtemps critiquées
et invalidées par de nombreux travaux scientifiques (Boserup dès 1965, Tiffen
et son ouvrage au titre provocant « More
people, less erosion » en 1994, et bien d'autres).
Ici,
la question de l’interobjectivité n’est pas considérée, il n’y a pas de
confrontations, d’ajustements, de ré-expérimentations
avant d’autres conclusions, les interprétations étant proposées dans des temps
différents. Mais au-delà, du fait que les processus à l’œuvre sont plus
complexes, il est difficile de les comprendre sans rentrer dans l’explicitation
de la méthode utilisée et de ses conséquences sur les résultats proposés. L’action
publicitaire ne peut reprendre quelque chose qui relèverait des choix du
chercheur et in fine engagerait celui
… du consommateur. EDF est le “leader
européen des énergies de demain”,
mais pour que ce demain soit, il faut faire le bon choix aujourd’hui (celui
d'EDF ?)[6],
d'autant que les hommes doivent bien avoir conscience que comme les habitants
de l'île de Pâques piégés sur leur île, ils sont tous piégés sur la terre. La
publicité nous rappelle d'ailleurs “on ne
peut pas la quitter”. La finitude irrémédiable de la planète
doit donc les inquiéter au regard de leurs choix. Et
on peut faire avec le géographe britannique Denis Cosgrove, le rapprochement
entre la conception durabiliste actuelle de notre planète et la vue de cette
dernière par les astronautes de la
NASA posant le premier pas sur la Lune en 1969 (Cosgrove, 1994).
Car, voir la terre en perspective, à une très petite échelle, c'est la voir
dans son unicité organique indépassable.
Cette
publicité d’EDF renvoie d'une part au conservationnisme et aux théories
néo-malthusiennes qui caractérisent certaines conceptions de l'environnement ;
d'autre part aux problèmes environnementaux les plus "populaires"
(déforestation, surexploitation des ressources par des sociétés du Sud
prédatrices de leur environnement). En revanche, dans notre société moderne de
la connaissance et suivant le message d'EDF, miser sur l'exploitation de
l'électricité permet de réguler plus rationnellement l’exploitation des
ressources terrestres, d'assurer un développement durable et donc de garantir
le maintien de la vie sur terre. EDF communique beaucoup sur la recherche, sans
jamais évoquer la question du nucléaire, encore moins celle du recyclage des
déchets radioactifs. Un tour de force qu’effectue également Areva en parlant du
nucléaire comme d’une « énergie au sens propre ». De toutes
les entreprises, elle est sans doute la plus aguerrie aux controverses
environnementales. Dès le début des années 1970 en effet, l’électricien a dû
intégrer à ses stratégies des contestations anti-nucléaires extrêmement
virulentes. Sa grande expérience transparaît dans l’efficacité de son message
publicitaire.
“Un
bébé naît, Guigoz plante un arbre”
Cette entreprise joue d’une certaine manière
sur le même registre de la déforestation et de la démographie, mais
aborde la question des naissances de façon originale. Il s’agit tout de même du
fondement de sa prospérité …
Le
constat de la déforestation est ici finalement un préalable acquis, et Guigoz
propose une forme de compensation, destinée à maintenir l’équilibre entre
croissance démographique et ressource végétale : “1 bébé, 1 arbre”. On peut également interpréter cette
publicité dans une posture métonymique. En effet, on a ici un jeu de
similitudes provoquées par la proximité enfant-arbre compris comme les
dernières ressources de l’humanité dans son ensemble. La partie, l’arbre, mais
aussi le bébé, doit être pensée pour le tout, la forêt et au-delà
l’environnement, et au-delà l’ensemble des personnes qui vivent sur notre
planète. Donc nourrir un enfant, c’est sauver un arbre, et donc notre
environnement, mais inversement, sauver un arbre, c’est aussi nourrir un enfant
et notre planète. L'idée de transmission aux générations futures, d'équité
intergénérationnelle aussi, inhérente au développement durable, est mobilisée
en se fondant sur l’image forte du bébé.
La
firme a tout de même le mérite d’associer l’Office National des Forêts et nous
permet ainsi de penser que le reboisement sera effectué dans les règles de
l’art. Ce n’est pas toujours le cas et le geste environnemental peut alors avoir
des effets anti-écologiques. Dans un article intitulé « Tempête sur Versailles », Véronique Dassié (2002) explique
que la tempête qui balaya la
France en 1999 semble avoir changé le statut des arbres : « longtemps destinés à produire de la matière
première, ils deviennent dans les discours, plus que des arbres, des êtres
vivants qu'il faut protéger et conserver ». Le processus produit par l’évènement de 1999 est
compassionnel. L’émotion « qui
s'enracine dans l'arbre est source d'un élan patrimonial » (Dassié, 2002), cet élan est
irrationnel. Plus récemment, dans l’hebdomadaire l’Express (Olivier Le Naire,
« Versailles, avant…après…et côté jardins », n° du
27/09/2007), Laurent Choffé,
adjoint à l’architecte en chef des Monuments Historiques chargé de la restauration
du parc de Versailles, confesse qu’à sa manière, cette tempête fut une aubaine « car le public n'aurait jamais admis une
campagne d'abattage radicale. Or ces abattages étaient indispensables, puisque
les plantations des jardins de Le Nôtre étaient conçues pour être renouvelées
tous les cent ans. Pour la plupart, elles en avaient 120. Il était temps d'agir ». Nombreuses sont les
situations où une pensée écologique sommaire des riverains s’oppose désormais à
la science des forestiers et empêche des abattages sanitaires d’arbres.
La traduction simpliste de la relation entre
l’environnement et l’arbre est en effet récurrente dans le message écologisant.
A l’occasion de la promotion de son récent ouvrage “C’est bon pour la
planète” Evelyne Dhéliat prétendait
acheter des sapins de noël en motte et les replanter par la suite. On ne peut
demander à la présentatrice de la météorologie sur TF1 de connaître les
programmes de restauration de la qualité écologique des milieux dans le Morvan,
derrière les cultures de sapins de noël[7].
On ne peut lui demander non plus de plonger dans les règlements d’urbanisme qui
interdisent, au nom du paysage et du cadre de vie justement, les plantations
d’arbres résineux à haute tige dans les quartiers résidentiels. Pourtant, ce type
de raisonnement simpliste diffusé à heure de grande écoute, en transformant la
cause écologique en niaiserie de consommation courante, peut avoir un effet sur
les représentations des populations et donc rejaillir sur le sens de leur
implication dans le débat public.
Qu'il
s'agisse des slogans qui constituent des raccourcis vertigineux et gomment
toute analyse systémique ou d'images chocs, la réduction de la complexité des
relations homme-nature articule de nombreux discours : ceux des grandes
entreprises qui cherchent à valoriser leurs produits et leur image comme ceux
des collectivités territoriales ou des associations écologistes. Tous visent un
même but, l'efficacité de leur action. Que cette action soit mercantile,
politique ou militante.
“Evitons ça !”
Les
pouvoirs publics ne sont pas épargnés par le mouvement qui vise à toucher la
corde émotionnelle du citoyen. Il ne s’agit plus là de vendre une énergie
soi-disant plus propre, un petit-pot ou un livre, mais de faire la promotion
d’une politique publique environnementale. Une campagne de communication du Conseil
régional d’Aquitaine montrait récemment une série d’images chocs assorties d’un
slogan simple : “évitons ça !”.
La
première photo rappelle le désastre de décembre 1999, décidément efficace pour
susciter l’adhésion, laissant croire que les politiques régionales disposent
d’une solution face aux ouragans. Un plan climat régional qui contribuerait à
la lutte contre les gaz à effet de serre nous permettrait-il d’éviter de
nouvelles tempêtes ? Il y a loin, semble-t-il, des moyens d’intervention
d’une région française à la maîtrise des fureurs météorologiques. La seconde
image montre la sécheresse et suggère un processus d'aridification en marche, à
l’image des campagnes de sensibilisation sur la question du Sahel, dans les
années 80. Ces campagnes, notamment celles de l'UNICEF, associaient l’argile
craquelée par le soleil, à la famine et à l’image d’enfants mourant de faim. La
dessiccation du lit d’une rivière bien de chez nous, doit nous alerter sur
l’urgence de la situation en ce qui concerne le réchauffement climatique et la
baisse des nappes phréatiques. Cette image doit nous inciter à adhérer aux
politiques mises en œuvre par les pouvoirs publics, notamment l’interdiction
d’arroser pendant certaines périodes de l’année ou de la journée. Ce phénomène
est pourtant récurrent sur les bords vaseux des cours d’eau, il n’est pas
forcément catastrophique. C’est bien ici la mise en scène, associée à des
référents qui se sont installés dans une culture commune, qui confère à la
situation son caractère dramatique.
Les
slogans et la dramaturgie peuvent être utilisés pour favoriser la mobilisation,
et l’on pense aux campagnes actuelles du ministère de l’écologie et de
l’aménagement durable pour inciter les citoyens français à éteindre la lumière
lorsqu’ils quittent une pièce, ou à fermer le robinet lorsqu’ils se lavent les
dents : projet politique ou aveu d’impuissance ? Le discours est
normatif, la rhétorique actuelle de la durabilité produit un ensemble de prescriptions
qui devraient faire effet dans quelques dizaines d’années, suffisamment
longtemps pour que nos technologies aient changé. Ce genre de message peut
paraître dérisoire voire stérile quant à son impact mais il n’est pas sans “performativité”.
Cette dernière est en fait une conception étayée par le philosophe John Austin
dans son ouvrage « Quand dire, c’est faire » (1962). Pour lui,
l’action du discours peut parfois être action tout court, même s’il peut y
avoir découplage temporel entre les deux. Et ce que nous demandons en tant que
citoyens, c’est justement que nos élus agissent. A défaut de faire, les hommes
politiques peuvent dire et surtout rendre visible cette action de dire. Et quoi
de mieux que la publicité pour compléter ces deux axiomes sociologiques et
combler le vide politique : action et visibilité de l’action.
La science participe
Le
monde associatif n’est pas épargné par la nécessité de cette communication
racoleuse. Sa légitimité est assise sur son désintéressement[8], elle
est parfois confortée par le soutien scientifique. Indépendamment de la
justesse du combat de l’association et de son intégrité, le slogan du WWF (“Le Rhône : un désastre écologique »)
pose au chercheur un problème éthique : quelle crédibilité accorder aux
résultats d’une étude, fût-elle réalisée par 300 médecins, qui déclare ses
conclusions avant d’être lancée ? L’opération coup de poing joue de notre
crédulité : l’eau du Rhône serait en fait devenue un produit irritant ou
nocif puisqu’elle est explicitement symbolisée par la croix au milieu de PCB.
Croix plus directement compréhensible que le PCB (polychlorobiphényles)
lui-même. Ce produit hautement toxique pour l’homme en général (en bout de la
chaîne alimentaire) et pour le milieu halieutique en particulier nous renvoie à
l’idée d’empoisonnement qu’évoque la bouteille avec le squelette du poisson. Le
slogan “Sommes-nous contaminés ?” induit une réponse affirmative.
L’idée de cette contamination et de sa découverte par une association qui ne
relève pas des pouvoirs publics tend à nous faire croire que l’administration
publique dans son ensemble et sanitaire en particulier nous cache quelque
chose. On joue ici du ressort d’un imaginaire qui a trait aux légendes
urbaines, sorte de rumeurs fondées (ou infondées peu importe) qui traversent
les discours de café du commerce, et qui s’étayent de jour en jour, en boucle, pour
fonder une intersubjectivité latente qui ne demande qu’à se renforcer lors de
nouvelles révélations.
Cette
intersubjectivité trouve sa légitimité dans le poids pédagogique de l’autorité
scientifique représentée non par WWF mais par les médecins préleveurs. Ces
derniers sont entrés en résistance par rapport à l’administration sanitaire,
les « collaborateurs » de l’Etat. Mais à force de rhétorique, le
lecteur se perd dans ses propres capacités d’action. L’accusation existe mais
elle n’a pas d’accusé direct à mettre dans le box, et comme les personnes
lésées, le citoyen se retrouve sans comprendre pourquoi il en est ainsi, quel
est le mobile, pourquoi et par qui l’acte a été commis.
Analyse cognitive de l’action
Dans
ces exemples retenus parmi d’autres, les acteurs économiques, politiques et
associatifs construisent des mythes ou des récits accessibles à tous. Ils
convoquent la science pour vendre ou pour justifier leur a priori, détournent des images pour interpeller les citoyens et
ouvrir des fenêtres dans l’agenda politique. Dans cette démarche, il n’est plus
question de l’incertitude consubstantielle des problématiques
environnementales. Les thématiques accrocheuses de la déforestation, du
désert qui avance ou de la surpopulation sont notamment utilisées car elles
permettent de mobiliser l'heuristique de la peur. Pour éviter les catastrophes
naturelles et humaines irréversibles (comme celle de l'île de Pâques), il faut
suivre les préconisations soit des multinationales comme EDF ou GUIGOZ qui
travaillent à notre bien commun, soit des collectivités territoriales qui
contribuent à nous assurer un environnement quotidien vivable, soit enfin des
associations qui réveillent en nous notre conscience de citoyen du monde
responsable, ayant des devoirs envers la planète. Mais si la peur est un moyen
historique, universel et sans faille pour orienter la conscience collective,
elle renvoie à deux courants philosophiques différents : celui mobilisé
ici qui considère la peur comme un outil heuristique et éthique (Jonas)
; un autre qui considère l’heuristique de la peur comme une manipulation
politique terrorisante, susceptible de produire une dérive totalitaire au nom
du bien (Huxley 1932). Enfin, avec la peur, les publicités évoquées jouent
aussi sur le grand classique que constitue le sentiment de culpabilité et la
culpabilisation. Culpabilité qui recourt à notre inconscient collectif
occidental imprégné des conceptions religieuses dualistes (le bien et le mal,
l’enfer et le paradis) qui nous amène à faire un choix, celui de l’action vers
le bien. Actions vers le bien qui sont souvent prédéfinies par des autorités
hiérarchiques, sortes de tutelles morales plus ou moins manipulatrices et
elles-mêmes manipulables. Le Conseil Régional, qui nous amène à ordonner nos
consciences par la publicité, ne l’est-il pas par divers lobbies industriels ou
associatifs ?
Comment
dépasser ce type de construction ? Comment passer d'une culpabilisation “passive”
à une responsabilisation active ? Comment aussi construire quelque chose qui
relève plus de l’éducation civique, c'est-à-dire développer les capacités du
citoyen à s’investir et produire du projet collectif ? En changeant d'échelle
peut-être, et en ciblant un niveau d’appréhension de l’espace pour l’individu,
mais qui se construit à travers l’action de tous : l'espace de proximité.
La réhabilitation du local est bien inscrite dans les orientations du
développement durable, au sens de l’espace de vie, de l’espace du quotidien.
Finalement, à travers les différentes conceptions
des modèles économiques (croissance ou décroissance), des idées demeurent, il
faut instruire la mise en forêt des espaces. Cette dernière est donc bien un
point d’ancrage de l’interobjectivité dans ce qu’elle a de plus normatif et en
tant qu’elle se substitue à tout esprit critique !
Conclusion
Dans
un contexte présenté “d'urgence environnementale”, face à quelques scandales
retentissants et à la pression sociétale, les entreprises ont connu une
fragilisation de leur image et se sont engagées dans des démarches dites
éthiques : « La morale commande,
l'éthique recommande »
(Comte-Sponville, 1991). Mais l'aspect volontaire de ces démarches n'empêche
pas leur instrumentalisation et “l'agir
éthique” peut simplement
coïncider avec un simple souci, très libéral, d'accroître des performances
financières. La vraie distinction à faire et à analyser serait peut-être entre “l'agir éthique” très en vogue, visible et lisible et un “être éthique”, révélateur de valeurs plus profondes
qui guideraient un engagement de l'entreprise (Bossanne, 2006).
L'analyse
que nous avons engagée montre comment des multinationales, des ONG ou des
collectivités territoriales, ayant des objectifs divers (intentions mercantiles
pour les premières, projet collectif pour les secondes) mobilisent les mêmes
ressorts pour produire une communication sur le développement durable et
l'environnement. Les projets sont différents mais les moyens iconographiques ou
les slogans font tous appel à la fois à l’émotionnel et à des référents de
morale quasi religieuse. Ils mettent en exergue, non pas un processus de
responsabilisation de la société dans son ensemble qui pourrait aboutir à
réfléchir, construire, produire un projet collectif partagé, mais la
culpabilité. Et c'est au regard de cette culpabilité, que ces multinationales,
ONG ou collectivités territoriales nous proposent un discours “prêt à penser”,
des méthodes “prêtes à appliquer” ou “prêtes à acheter”.
Faut-il
alors prévoir une forme d’intervention publique destinée à contenir les excès
du marketing écologique ? La réponse n’est pas simple tant les catégories
de messages sont enchevêtrées les unes dans les autres. En outre, comment
déplorer le marketing écologique de tel groupe multinational lorsque les
organisations territoriales et politiques utilisent les mêmes ressorts pour
gagner l’adhésion des citoyens ? De même, comment critiquer les
simplifications de discours publicitaires vantant les mérites de la durabilité
d’un produit ou sa qualité environnementale quand les associations écologistes
brandissent elles aussi des slogans qui réduisent singulièrement la complexité
des systèmes socio-environnementaux ?
Le
développement durable, en réconciliant les sphères de l'économique, de
l'écologique et du social a abouti à donner au système économique une capacité
à intégrer le discours de la doctrine, sans que finalement ne soit
remis fondamentalement en cause le modèle de développement. Etrangement
cependant, alors que “l’agir humain” et la notion de travail (ou
d’emploi ?) sont essentielles, une des trois dimensions du développement
durable est absente dans l'ensemble du corpus documentaire que nous avons
mobilisé : la dimension sociale. Comme si le registre du social disparaissait
de l'intérêt collectif ou plutôt qu’il était induit aujourd’hui par
l’économique. Ce prérequis idéologique (sans économie, point de social)
s’impose aujourd’hui à l’ensemble des orientations politiques des Etats
européens.
Le
dernier titre de l’hebdomadaire Le Monde
2 est explicite à ce propos : « La nature va sauver
l’industrie » (n° 216, Supplément au Monde n° 19658 du 5 avril 2008). Dans
un article du Point (n° 1855, du 3
Avril 2008, p. 165) intitulé « Le
Vert est dans le fruit », Frédéric Lewino nous propose de redescendre
sur terre : « Ce tapage cache-t-il un grand bluff commercial ou
les premiers signes d’une révolution verte ? »
questionne-t-il ? « Pour en finir avec la pollution sans renoncer
au développement, l’écologie industrielle propose de construire des villes et
des usines qui s’inspirent de la nature ». Ainsi, la nature ne va pas
nous permettre de mieux vivre, de mieux nous relier entre-nous, d’y trouver des
joies communes, mais seulement de pouvoir mieux faire fonctionner les entreprises
et, à la rigueur, leurs employés.
Le
politique semble aussi faire les frais de cette évolution qui laisse aux forces
économiques les leviers du projet de société : Total se joue ainsi des
pouvoirs publics en affichant avec force, face à la formule obligatoire “l’énergie
est notre avenir, économisons-la”, son propre slogan qui ridiculise le
premier “Pour vous notre énergie est inépuisable”. Véolia transports
fait peut-être mieux et plus subtil en s’attribuant, rien moins, les mérites
des nouvelles politiques de la ville et du développement des transports en
commun : “En transportant plus de 2,5 milliards de voyageurs chaque
année, Véolia Transport libère l’espace urbain…” vante en effet une des
publicités de la firme.
Ce
sont enfin les instances éducatives qui sont touchées de plein fouet par cet
écomarketing et cette prééminence des sphères de la communication sur celles de
la connaissance. La mystification est totale, les éducateurs sont embarqués
dans le tourbillon. Un manuel d’économie de terminale STG (Extrait du manuel
d’économie de Terminale STG, P. Le Bolloch, Y. Le Fiblec et MC. Mouline,
éditions Bertrand-Lacoste, mai 2006)
présente ainsi aux élèves des publicités de Carrefour, Véolia et Gaz de France
comme une manifestation de l’engagement effectif des industriels dans le projet
de développement durable : « Véolia nous incite à exiger du
progrès qu’il préserve la vie. Gaz de France nous assure qu’il travaille “pour
demain”. Et Carrefour veut nous faire prendre conscience de l’urgence
qu’il y a à “mieux consommer” » écrivent les auteurs du manuel
en présentant des publicités de ces entreprises comme explication de ce qu’est
le développement durable, à côté d’un extrait d’ouvrage de Michel Edouard
Leclerc, président d’une grande chaîne d’hypermarchés.
La
connaissance académique est court-circuitée à l’école même : le comité
national “l’école agit” (le Grenelle de l’environnement à l’école) est porté
par le Ministère de l’Éducation Nationale et hébergé sur le site du centre
national de la documentation pédagogique ; c’est lui qui doit sélectionner
des projets d’établissements exemplaires dans le domaine du développement
durable. Cette instance est présidée par Nicolas Vanier, un de ces héros écolos
de la sphère médiatique, et compte parmi ses membres éminents la présentatrice
de la météorologie de TF1 Evelyne Dhéliat, entre un professeur d’université et
un député de la République : ouverture de l’école à la société
civile ?
Au
final, à travers l'ensemble de ces stratégies de communication, on aboutit à une
conformation, un regard unique sur le développement durable. Cette conformation
relève de deux compromissions. L’une plus individuelle et ciblée sur des
personnages qui créent leur autorité scientifique dans la société à travers les
médias, ce que Bourdieu appelait la complaisance à l’hétéronomie. Pour le développement durable,
l’hétéronomie relève des “lois du commerce”, “de l’économie” qui sortent du
champ spécifique de la science et de sa critique par l’expérimentation, la
réflexion, l’incertitude, la précaution, etc. L’autre, plus collective, autour
de la mise en place d’une “novlangue”, d’un nouveau langage apparemment partagé
par tous et qui véhiculerait nos façons collectives d’être et de faire, ce que
Eric Hazan à la suite des travaux du philologue Viktor Klemperer sur la LTI (Lingua Tertii Emperii) appelle la Lingua
Quintae Respublicae
(ou LQR) la langue de la cinquième République, celle du néolibéralisme qui vend
et vante à travers “sa propagande du quotidien” et de la proximité, l’inventivité,
l’innovation et la compétitivité. Les politiques de l’Etat suivent le
mouvement, en France, la Délégation interministérielle à l’aménagement et la
compétitivité des territoires a remplacé la Délégation à l’aménagement du
territoire et à l’action régionale. L’action régionale est ainsi remplacée par
la compétitivité des territoires. Pour Jean-Louis Borloo, ministre de l’Ecologie, de l’Energie,
du Développement durable et de l’Aménagement du territoire :
« Le développement durable n’est pas une mode passagère ou un argument
marketing, mais le fondement même de la compétitivité de demain » (Le Point n° 1855, 3 Avril 2008, p. 170).
Mais qu’est-ce que la compétitivité, si ce n’est l’orientation de l’ensemble de
notre démarche existentielle dans l’idée d’écraser l’autre au niveau économique
voire social et politique. Autant de glissements sémantiques qui expriment
notre nouvelle manière d’habiter le monde. Et pour reprendre les termes d’Emile
Cioran (1911-1995), « on habite sa langue comme on habite le monde »
(1995). L’éducation à l’environnement éthique doit critiquer ces fausses
évidences (Taken-for-granted), ces naturalisations des processus sociaux
et économiques actuels fournies par des penseurs à la sauvette et repris par
l’intelligentsia politique et économique. Chaque citoyen est un faiseur de
choix, de décisions, de procédures, c’est la base de l’idée de démocratie.
Toutes les publicités semblent nous le rappeler, mais encore faut-il avoir
accès à la prise d’information pour construire son opinion propre et non
uniquement avoir accès à une information prédigérée qui mène à la conformation
des esprits.
Enfin,
cette capacité très performante des multinationales et des médias à s'emparer
du développement durable et de l'environnement ne signe-t-elle pas, d'une
certaine façon, la fin de l'engagement politique dans le développement durable
et l'éducation à l'environnement et au développement durable ? Véolia
s’attribue les mérites du changement de mode de déplacement en ville, EDF
construit des liens avec l'éducation nationale dans le domaine de l’éducation à
l’environnement et au développement durable. Ce recul du politique est
inquiétant. En donnant les clés du développement durable à l’entreprise et aux
médias, le système déresponsabilise la société et le citoyen, l'investissement
collectif et individuel dans le projet d'éducation civique ou d'EEDD et dans
l’action collective. L'éducation constitue bien alors un enjeu et un défi
majeurs dans l'espoir de construire des comportements éthiques et responsables.
Les formes que prendront notamment l'EEDD seront peut-être déterminantes à
l’heure d'un changement éventuel de modèle démocratique, voire de modèle de
développement. Pour ce faire, l’éducation doit redonner toute sa place et son
rôle à l’apprentissage de l’esprit critique et de la controverse, pour les
jeunes et les moins jeunes.
Mais
éduquer à la critique, c’est permettre une remise en cause des hiérarchies
institutionnalisées, des autorités « naturelles » mais népotiques et ouvrir
la porte à la fragilisation du pouvoir en place. Et quel pouvoir accepterait
aujourd’hui cette remise en cause ?
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[1]
L’ensemble du corpus documentaire est consultable à l’adresse suivante : http://critiquesdepub.blogspot.com/
[2]
Circulaire n°2007-077 du 29 mars 2007 de l’Education nationale relative à la
« seconde phase de généralisation de l’éducation
au développement durable ».
[3]
L'éthique de l'environnement, née dans le monde anglo-saxon, se divise en
plusieurs courants plus ou moins radicaux, que nous ne détaillerons pas ici
(cf. l'ouvrage dirigé par Alefeissa).
[4] Là
encore, on peut voir que l’objectivité du Développement Durable n’existe pas et
qu’il y a une multitude de constructions sémantiques sur la question, ce que
nous appelons une interobjectivation.
[5] L'arrêté
du 28 novembre 2006 a imposé la mention de ce slogan dans la publicité faite
par une entreprise vendant de l'électricité, de la chaleur ou du froid, des
combustibles solides, liquides ou gazeux, des carburants, ou par les services
afférents à l'utilisation de ces énergies, à partir du 1er mars
2007.
[6]
Rappelons que cette question du choix réfère implicitement pour EDF à
l’ouverture des marchés européens et à la perte du monopole que cette
entreprise publique avait sur le marché français. Cette perte du monopole du
fait de la dérégulation oblige les entreprises à prendre les devants en terme
d’image pour inscrire durablement une sorte de monopole psychique. C’est le cas
également pour France Telecom par exemple.
[7] Dans le Morvan, le sapin de noël soustrait
près de 1500 ha du territoire à la biodiversité pour couvrir un quart de la
consommation française d’arbres de noël. L’arbre de noël est un produit de
l’activité agricole et non forestière. Outre son impact paysager, l’utilisation
massive de produits phytosanitaires a un impact sur la qualité du milieu.
Certaines de ces plantations, réalisées de façon opportuniste sont abandonnées
avant d’être exploitées et se transforment en bosquets timbres-postes. La
monospécificité des peuplements d’épicéas qui les composent et l’absence
d’entretien dont ils sont l’objet dégradent alors leur état sanitaire, ils
peuvent constituer des foyers de dissémination parasitaire en direction de
peuplements forestiers sains voisins.
[8] Dans un
article de Libération du 3 avril 2008, le président du WWF France a cette
réflexion de manager économique à propos de la relation de l’ONG avec les
grandes entreprises donatrices de l’association (Total, par exemple) : “Il serait presque souhaitable qu’on ait un
concurrent”. Cette formule démontre l’hégémonie économique de
l’organisation et son inscription sur un véritable marché de la cause
écologique. Elle tranche avec l’idéal de désintéressement attaché aux
associations ou ONG en général.
Cet ensemble documentaire illustre l'article ci-dessus
Document n°1
Document n°2
Document n°3
Document n°4
Document n°5
Document n°6
Document n°7
Document n°8